Réforme du lycée: les conséquences concrètes des annonces ministérielles du 21 octobre 2008 (2/2)

Publié le par SNFOLC Jean Renoir

Quelles sont les conséquences concrètes de la réforme des Lycées ?

 

Conséquences pour nos obligations de service, pour notre statut :
La réforme des lycées conduit à la disparition des décrets de 1950 : plus de VS, plus de première chaire etc…
Actuellement, que nous soyons certifiés, agrégés, PEPS, nos obligations de service, en vertu des décrets statutaires du 25 mai 1950, consistent en un maximum hebdomadaire d’heures de cours dans notre discipline. Notre service n’est pas annualisé. Nous avons un emploi du temps hebdomadaire, le même toute l’année. Nous signons chaque année un VS. Au vu de ce VS, et en application des décrets de 1950, nous pouvons percevoir des HSA, une heure de première chaire, une heure de labo etc…
Avec la réforme des lycées, il n’y a plus d’emploi du temps valable toute l’année. Il y aura 2 semestres, donc deux rentrées scolaires, deux emplois du temps.
En outre, la réforme des lycées, prévoit de contraindre les professeurs à assurer d’autres tâches que l’enseignement : « soutien scolaire personnalisé, conseil d’orientation, travail interdisciplinaire, travail d’expertise, bilan personnalisé, conseil », que ce soit dans le cadre des modules d’accompagnement éducatif, ou de la semaine « sans cours » qui aurait lieu entre les deux semestres.
Préserver nos obligations de service hebdomadaires (décrets de 1950) concerne tous les enseignants qu’ils soient en collège, en Lycée, en LP.

Conséquences pour le Bac: la réforme des lycées conduit inéluctablement à la disparition du bac.

Actuellement, le bac est un examen ponctuel, anonyme, terminal, national. Les 4 qualificatifs ont leur importance. Actuellement, il y a des séries générales (L, ES, S) ou technologiques (STG, STI, STL, ST2S…). Cela donne lieu à des sujets nationaux, confectionnés sous la responsabilité des corps d’inspection. Il y a le sujet de maths de la série ES, le sujet de physique de la série STI, le sujet de philo de la série L etc…

Avec la réforme, il n’y a plus de séries. Chaque élève construira, notamment en 1ère/Terminale son propre parcours en empilant des modules semestriels comme on empile des briques de Lego. Il devra donner à son parcours une certaine coloration (ou dominante) : Arts et Humanité ; Sciences ; Sciences de la Société ; Technologie. Mais ces dominantes ne sont pas des séries. Chaque élève construisant son propre parcours, il y aura donc presque autant de parcours que d’élèves. Il est impossible dès lors de confectionner autant de sujets nationaux qu’il y aura de parcours choisis. Les groupes de travail pilotés par le Recteur Gaudemar, ont évoqué l’idée que chaque module semestriel devra être évalué, séparément en CCF (contrôle en cours de formation). Gaudemar lui-même ayant expliqué qu’il ne voyait pas pourquoi on évaluerait en fin de terminale une notion vue au premier semestre de première. La somme de ces CCF s’appellera peut être encore « Bac », mais ce ne sera plus le bac, tel que nous le connaissons.

Sachant que la tentative de destruction du bac en 2005 avait fait descendre des centaines de milliers de lycéens dans la rue, Darcos a prudemment déclaré « la nouvelle organisation du Lycée n’implique pas de réforme du baccalauréat, qui restera l’examen national auquel les Français sont si attachés ». Il joue avec les mots. Les élèves quitteront peut être tous le Lycée avec un « Bac », mais ce ne sera plus l’examen ponctuel, anonyme, terminal, national, que nous connaissons.

Conséquences pour les COP et les CPE

La réforme des Lycées prévoit implicitement leur disparition. Le suivi, l’orientation, l’accompagnement éducatif, feraient partie des obligations de service des enseignants. Dès lors, plus besoin de COP ni de CPE.

Conséquences pour nos disciplines

La réforme de Lycées remet en cause et méprise notre enseignement disciplinaire.
Les horaires sont réduits : actuellement, en classe de seconde, le total : Français + LV1+ LV2 + Maths + Hist-Géo + SVT + Physique + EPS atteint 25,5 heures-élève et 34,5 heures-prof (en comptant l’aide individualisée). Avec la réforme ce même total n’atteindrait que 21 heures élève.

Le ministre garde le silence sur l‘horaire prof. Ce qui peut laisser craindre la suppression de nombreuses heures de dédoublement. Quelles conséquences sur le nombre de classes, de niveaux par professeur ?!

Des disciplines sont marginalisées : Par exemple, la SES n’apparaît que comme un enseignement d’exploration modulaire. Un élève ne peut donc très bien n’avoir en seconde que 50 heures de SES, contre 2,5 heures hebdomadaires actuellement (soit 90 heures). Il en va de même pour les langues anciennes.

Menaces sérieuses sur toutes les disciplines technologiques : Actuellement, il existe les séries STI, STG, STL, ST2S, STAE, Hôtellerie ; la seule série STI comporte 8 spécialités, certaines spécialités comportent à leur tour des options. Chaque série, chaque spécialité, chaque option, correspond à un enseignement, à un savoir faire spécifique. Tout ceci est « broyé » regroupé en une seule « dominante technologique ». Les groupes de travail sur la réforme ne mentionnent plus l’existence du bac technologique. Il n’y aurait que 2 bacs : le « bac » (sans autre qualificatif) et le « bac pro ». Le Ministre assure : « la voie technologique sera préservée ». Comment le croire ?!

Des disciplines sont regroupées : Par exemple : ISI et ISP fusionneraient en une seule discipline appelée Initiation aux sciences de l’ingénieur et de la Production. SVT et Physique semblent avoir été regroupées en une seule discipline appelée « sciences expérimentales ».

Des disciplines sont disloquées. Des disciplines (maths, Histoire Géo…) apparaissent à la fois dans le bloc des enseignements généraux (enseignement à l’année) et dans celui des enseignements d’exploration (enseignement semestriel). Un élève pourrait donc avoir un prof de maths à l’année, et un autre pour un semestre.

Le zapping et le consumérisme pédagogiques sont encouragés.
eaucoup de discipline n’apparaissent que dans les enseignements d’exploration, c'est-à-dire des enseignements optionnels, d’une durée d’un semestre pour un volume de 50 heures.

Il faudrait alors que le professeur construise une progression sur un seul semestre !Nous sommes professeurs, nous avons passé un concours, notre enseignement mérite le respect. Nous ne sommes pas des marchands qui, en 50 heures devrions avoir à convaincre des clients (les élèves) qu’ils doivent continuer notre cours durant un second semestre de 50 heures, plutôt que d’ aller voir un concurrent (un collègue d’une autre discipline). Quel mépris pour nos métiers !

Conséquences pour les élèves
La réforme des Lycées plonge les élèves dans le chaos.
Chaque professeur, chaque parent, sait bien que les élèves ont besoin de repères : une classe, un emploi du temps, une série, un programme, un examen national.
Avec la réforme des Lycées, tout cela vole en éclats ! Il n’y a plus de groupe classe. Les élèves errent de modules en modules. Il n’y a plus d’emplois du temps, mais des plannings semestriels individuels. Il n’y a plus de séries, mais chaque élève doit composer son propre parcours (comment saura-t-il le parcours qui mène aux études de son choix ?!). Il n’y a plus d’objectif de passage dans la classe supérieure, car les redoublements seront quasiment abolis. Il n’y a plus de bac national, le même pour tous, mais une succession de validations de modules semestriels.
Le Ministre veut envoyer des jeunes de 15 ans dans un lycée qui serait un labyrinthe de modules, de dominantes, de blocs etc…

Que le Ministre ne nous dise pas que sa réforme est motivée par l’intérêt de l’élève. Le seul but de sa réforme, c’est de supprimer encore et toujours plus de postes. (Selon un audit commandé par le Ministère, cette réforme en supprimerait 16 000)

 

Publié dans Réforme du lycée

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